Remises en question pour le Nouveau Komeito

La semaine dernière, le Yomiuri titrait "Pour le Nouveau Komeito vient le temps de la réflexion et de la refondation". En effet, la défaite aux élections législative du 31 août dernier a eu des répercussions nombreuses sur le monde politique japonais. Pour la plate-forme commune LPD-Nouveau Komeito, les pertes sont lourdes et pour ce dernier c'est une défaite majeure qui renvoie le parti « propre » à ses performances de 1967, quand il émergeait comme force politique dans l'échiquier politique de l'archipel.
Cette défaite a vu 8 députés perdre leur mandat, dont les deux principaux dirigeants du parti. Au total, le Nouveau Komeito n'aura réussi qu'à conserver 21 sièges sur les 31 qu'il détenait avant le renversement historique du parlement Japonais. Cette perte représente un revers politique majeur mais aussi un échec de la stratégie et de la communication du Nouveau Komeito auprès des couches les plus fragiles et les plus exposées de la population japonaise. Ces mêmes couches qui ont produit l'essentiel des membres de la Soka Gakkai de 1950 à 1980.

On peut attribuer ce recul à l'insatisfaction générale que la population ressent vis-à-vis des gouvernements successifs menés par le PLD, au pouvoir sans alternance réelle depuis bien trop longtemps. Mais la réalité est que les électeurs n'ont pas perçu de différence notable entre le message vétuste, vide de sens et conformiste du PLD et les projets sociaux et démocratiques du Nouveau Komeito, tels qu'ils apparaissent clairement dans leurs manifestes depuis 2002. Pour les japonais, les deux forces étaient parfaitement confondues et la sanction a été sans appel.
Plusieurs autres éléments de la politique du Nouveau Komeito ont été défaillants, ou ressentis comme tels, pendant les dix ans d'exercice du pouvoir aux côtés du PLD.
D'abord la résistance du parti face aux appels à la participation de la force militaire de défense nationale dans les engagements récents, notamment en Afghanistan et en Irak après le 11 septembre 2001. Cette résistance a été médiatiquement attribuée aux liens informels entre le Nouveau Komeito et sa base électorale, la Soka Gakkai, dont les principes de pacifisme et d'anti-militarisme ont été alors ressentis comme des freins et des limites.
Vient s'ajouter à cette position de principe, l'échec de relance de la politique d'aide initiée par le Nouveau Komeito et soutenue par un budget conséquent accordé par le PLD. Ces mesures d'allocations ont été vivement dénoncées comme des caches-misères et contestés par les partis d'opposition.
Enfin, durant le mandat de Yasuo Fukuda (qui précédait Taro Aso), le parti a été accusé d'être arrogant et de surévaluer son statut de partenaire clé dans la coalition, permettant au PLD de rester en place. Les commentaires acerbes de certains ténors du Nouveau Komeito au sujet de l'administration Fukuda et du premier ministre en particulier ont été assimilés à un manque de diplomatie et surtout de clairvoyance politique dans un contexte de coalition nécessaire.

Mais le tableau n'est pas entièrement négatif. Le Nouveau Komeito a gagné en stature politique et surtout prouvé qu'il pouvait participer activement à une administration gouvernementale, ce à quoi le DPJ, grand vainqueur par défaut de ces élections, ne peut en aucun cas prétendre. Le parti a intégré de nombreux mécanismes de négociation politique au sein de la coalition et pourra tirer les leçons de ses propres défauts dans la tenue d'une ligne politique forte.
Alors qu'une période nouvelle s'annonce pour la société japonaise, le Nouveau Komeito doit maintenant remettre en question sa communication et démontrer son courage politique. Fort de son expérience à la tête du pays, même en tant que partenaire minoritaire, le parti peut prendre gagner encore en stature en jouant l'arbitrage à la fois sur le plan législatif (il reste la troisième force politique) et sur le plan local (où il continue de conserver une influence certaine).
Toutefois, les changements à opérer sont nombreux et les délais sont courts avant la prochaine échéance électorale, à la Chambre Haute cette fois, l'été prochain. Le Nouveau Komeito devra éviter le contre-pied systématique de la politique du DPJ et surtout se garder de toute dérive populiste. Il lui faudra porter dans l'espace public japonais des projets politiques clairs, innovants, même s'ils apparaissent difficiles par les changements sociaux qu'ils impliquent. Enfin, le parti aura l'opportunité de mener une action politique en plein jour et non plus à l'ombre de l'encombrant et vieillissant PLD.

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